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Macron : peut-on croire à l’Emmanuel ?

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Publié le 17 janvier 2017 7 commentaires

Macron lors de son meeting parisien du 10 décembre 2016 – ALAIN GUILHOT / DIVERGENCE POUR LE MONDE

Une personnalité politique semble vouloir endosser, plus encore que les autres, le costume de Messie national : Emmanuel Macron. Si l’on résume souvent le phénomène Macron à une « bulle médiatique » gonflée d’ambitions personnelles et de soif de renouveau – forme de divertissement médiatique dans un univers politique marqué par l’alternance –, il importe de comprendre en quoi la campagne d’Emmanuel Macron est à prendre au sérieux dans sa manière d’entrer en résonance avec la crise profonde que traverse notre pays. Surtout, il est essentiel de se demander ce que le messie Macron est réellement venu apporter en politique et vers quelle Terre Promise il souhaite nous emmener. Est-il venu pour sauver la politique ou pour la perdre ?

Symbolisme messianique et imaginaires politiques

C’est tout à fait regrettable pour ceux qui pensaient Emmanuel Macron sans consistance, simple pantin à la solde des entreprises du CAC 40 : l’ancien ministre et conseiller de François Hollande a une vision cohérente du monde contemporain et un goût prononcé pour la mise en récit du politique. C’est même une des marques de fabrique d’Emmanuel Macron que cette croyance aux idéologies et aux imaginaires. C’est ce qu’a pu apprendre Mediapart à ses dépens[2] en pensant « coincer » le candidat Macron avec des questions sur les conséquences sociales de sa pensée économique : il y a derrière son programme économique une vision libérale et sociale cohérente, la défense d’un idéal émancipateur mariant savamment libéralisme économique et idéaux progressistes. Le leader du mouvement « En Marche ! » – qui reprend humblement ses initiales – ne déploie pas seulement une pensée cohérente : il croit à la force des symboles et des images pour convaincre.

Il est possible de voir dans le parcours d’Emmanuel Macron une forme de constance, depuis ses études littéraires à Henri IV jusqu’à sa candidature à la présidentielle, en passant par ses missions à la banque Rothschild. Le jeune élève de khâgne travaillait à l’écriture d’un roman picaresque ayant pour toile de fond l’Amérique du Sud des conquistadores, avant de travailler auprès de Paul Ricœur comme assistant éditorial pour son livre La Mémoire, l’histoire, l’oubli (2000). L’ouvrage traite de phénoménologie historique, c’est-à-dire de la perception sensible et de la construction de l’histoire. Embauché par la banque d’affaires Rothschild après son passage par la commission Attali, le jeune Macron acquiert par la suite une réputation de « Mozart de la finance » dans le domaine des fusions-acquisitions : rien moins que l’arrangement de ventes et rachats d’entreprises à partir d’un scénario argumenté. Tout au long de son parcours, Macron n’a cessé de raconter des histoires. Cette constante du personnage transparaît dans les différents documentaires retraçant son parcours[3]. Entré en politique, Emmanuel Macron ne tirera pas uniquement de ces expériences passées d’intéressantes relations dans les cercles de pouvoir, il en gardera un goût prononcé pour le story telling : à défaut d’écrire un roman en littérature, il choisit de devenir l’auteur d’un roman politique. Il le dit d’ailleurs avec clarté dans un documentaire diffusé sur LCP : « ce dont notre vie politique manque c’est d’un peu de la transcendance que la littérature et la philosophie apportent »[4].

L’évangile selon Macron

Quelle est la Bonne Nouvelle apportée par Emmanuel Macron ? Son originalité propre réside dans la fusion du symbolique et de l’économique pour composer un nouveau récit national. La nouvelle épopée collective sera économique et libérale ou ne sera pas. Rien de surprenant désormais si Jeanne d’Arc a permis en son temps de « lever les blocages » tel un réformateur en charge de flexibiliser le marché du travail. Quitte à faire une campagne à rebours des questions identitaires et sécuritaires, Emmanuel Macron a préféré travailler un récit du futur, une théologie du libéralisme promettant à la France un nouveau salut dans la mondialisation. Ce n’est pas non plus un hasard si le jeune candidat, désireux de rassembler à droite comme à gauche sur le terrain de la réussite économique, s’est affiché en compagnie de Philippe de Villiers l’été dernier, autre grand amoureux des constructions idéologiques et des symboles nationaux. Contrairement à des candidats comme Manuel Valls ou François Fillon, Emmanuel Macron ne se contente donc pas d’exposer une doctrine libérale : il la met en récit et lui accorde une forme de foi indéfectible.

À travers sa nouvelle épopée, l’ancien ministre de l’économie entend d’abord restaurer une grandeur et une unité perdue. La success story de l’entrepreneur de start-up doit entrer en résonance avec une France capable de réussir à nouveau. L’aventure économique collective vise à rassembler, par-delà les lignes de fracture de la société française. Voilà pourquoi le candidat à l’élection présidentielle adore adopter pour arrière-fond de ses discours les espaces de la fracture française ancrés dans l’imaginaire collectif, comme la banlieue qu’il ne cesse d’évoquer et de sillonner depuis son annonce de candidature à Bobigny. Il faut dire que les électeurs de banlieue sont aujourd’hui comme des brebis sans berger, en divorce avec la sphère politique et sensibles au discours du self made man, dans un univers ou la création d’entreprise est souvent la porte de sortie face aux horizons condamnés du marché du travail.

L’épopée économique proposée par le candidat Macron est simple : il faut quitter le vieux monde, verrouillé par des règles obsolètes pour une société nouvelle. Il s’agit « de faire entrer la France dans le XXIe siècle, de faire gagner notre pays, de la faire réussir dans un monde qui se transforme »[5]. Emmanuel Macron prend ainsi acte d’un ressenti collectif : celui de la remise en cause profonde des modes de fonctionnement hérités des Trente Glorieuses (en particulier dans le monde du travail et de l’entreprise), dans un contexte de poursuite de la mondialisation et de révolution numérique. Le monde ancien s’en est allé, un nouveau monde est déjà né et il s’agit de savoir en tirer parti. En cela, Emmanuel Macron ne construit pas sa pensée dans le sillage des camps politiques existants. Il ne cible pas un camp adverse en particulier mais existe à partir de sa propre vision du monde. Elle lui permet même de se définir en opposition à la classe politique dominante, accusée de présenter toujours « les mêmes hommes » et les « mêmes recettes ». L’énergie déployée par le pays pour aller de l’avant émane de la société elle-même et non de l’action de ses dirigeants politiques. Emmanuel Macron se situe ainsi du côté du peuple français qu’il s’agit de « faire gagner » contre des élites dont il est pourtant issu de manière assez classique. Il y a chez le messie Macron un récit de libération, une sortie d’Égypte vers la Terre Promise de l’économie mondialisée. L’Histoire de la France en tant que telle est d’ailleurs résumée à l’histoire « d’une émancipation »[6].

Il faut dire que la lassitude des Français a été scrutée à la loupe pour alimenter la stratégie de communication macronienne. Emmanuel Macron est le premier candidat à avoir réalisé une authentique étude de marché politique au moyen des équipes de son mouvement « En Marche ». Le travail de porte à porte des membres du mouvement a permis de collecter un précieux matériau pour alimenter les discours et le programme d’Emmanuel Macron, en cherchant à cerner les préoccupations du pays plus que ses besoins. D’où des grands écarts parfois amusants en matière de communication, visant à concilier différentes idées directrices, à commencer par le statut du mouvement « En Marche », présenté non pas comme un mouvement politique – les Français en ont assez des mouvements et partis politiques –, mais un mouvement citoyen. Le mouvement cible très clairement les déçus de la politique, en dehors des appareils existants.

Image de communication du mouvement « En Marche ! » (Meeting au Palais de la Mutualité, 12 juillet 2016).

Enfin, il est intéressant de voir comment Emmanuel Macron se donne une posture messianique en créant une attente autour de son programme et en dénonçant – autant qu’il les entretient – les persécutions émanant du restant de la classe politique à son égard. Dans son discours de lancement de candidature, il explique avoir vu ce qu’il en coûte lorsque l’on veut « sortir du système », la « haine » qu’il a subie, qui n’a fait que « renforcer [sa] détermination ». Le candidat s’emploie, depuis le lancement de son mouvement au printemps dernier, à ménager le suspens : il faut dire que le temps à tenir jusqu’au mois de mai 2017 peut paraître long. Il a d’ailleurs préféré s’éclipser par instant de la scène publique pour laisser ses adversaires susciter par eux-mêmes cette attente, en le faisant exister au travers de leurs critiques et de la vacuité de leurs discours. Dévoilant pas à pas son programme comme on ouvre les cases d’un calendrier de l’Avent, Emmanuel Macron continue à manier le chaud et le froid, l’hypermédiatisation et le silence radio. L’annonce de sa candidature entre les deux tours des Primaires était certes une manière de montrer qu’il n’entendait pas se plier au calendrier des uns et des autres, mais elle constituait surtout le moyen idéal pour organiser son propre lynchage médiatique par les candidats à la Primaire des Républicains. Détesté des chefs des prêtres et les pharisiens, Emmanuel Macron peut à nouveau en appeler au bon sens du peuple élu.

Salut ou mort du politique ?

Il est certain qu’Emmanuel Macron a su capitaliser sur la crise multiforme actuelle pour construire sa candidature (crise socio-économique, mais aussi crise idéologique, politique et partisane, avec notamment en balance la crise actuelle de la gauche) [8]. Il ne suffit pas, néanmoins, de dire que le jeune candidat à l’élection présidentielle a quelque chose de « rafraîchissant »[7], comme on vanterait les mérite d’un nouvel article du rayon produits ménagers. Quelles réponses aux attentes des Français apporte-t-il, au-delà de la formidable opération de communication qu’il orchestre ? Emmanuel Macron est-il venu pour sauver la politique ou pour l’abolir ?

Emmanuel Macron est venu rassembler le parti le plus en croissance dans l’opinion : celui des sans partis. Le nombre de personnes réunies lors de son meeting à Paris n’a, en cela, rien d’étonnant : même si la réussite du rassemblement est proprement incontestable, il est faux de dire qu’Emmanuel Macron « rassemble » 15 000 personnes ou sympathisants. Les attentes politiques et la curiosité vis-à-vis du candidat ont fait une bonne part du chiffre, en fédérant des personnes traditionnellement éloignées de la politique, des curieux venus d’horizons politiques centristes divers, en plus des adhérents au mouvement[9]. Beaucoup n’avaient d’ailleurs jamais participé à un meeting politique. Emmanuel Macron arrive sur le devant de la scène à un moment de déliquescence telle des partis que le fait de se présenter sans appareil partisan classique est plutôt un atout qu’un handicap – mais avec un courage qu’on ne peut que lui reconnaître. Sa trajectoire ne dit rien de la manière dont il entend faire vivre dans le temps son mouvement, au-delà même de la campagne, si ce mouvement permettra de renouveler les échelons de la vie politique et sur la base de quelles alliances partisanes il entend gouverner. Son libéralisme politique, qui entend donner toute leur place aux énergies du pays contenues dans la société civile n’est pas associé à des mesures concrètes expliquant comment il entend concilier exercice vertical du pouvoir et horizontalité, son programme faisant l’impasse sur les questions de réforme institutionnelle. Parfaitement marketé, le produit Macron pourrait bien décevoir dans la durée…

Le caractère salutaire et novateur des politiques économiques d’Emmanuel Macron est quant à lui contesté par différents économistes, à l’instar de Thomas Porcher, co-auteur d’une Introduction inquiète à la Macron-économie. Si l’on vante d’un côté le libéralisme assumé d’Emmanuel Macron, libéré des vieux scrupules de la gauche classique pour mener enfin à bien des réformes nécessaires de longue date, on s’inquiète, de l’autre, de la proposition de mesures s’inscrivant dans la continuité des politiques menées depuis 30 ans sans grands résultats en matière d’emploi (flexibilisation du marché du travail, adaptation du modèle social à la mondialisation, augmentation du temps de travail, …). Une des particularités d’Emmanuel Macron réside en tous cas dans son intérêt pour la révolution numérique : il semble croire à la possibilité pour la France de bénéficier d’une 4e révolution industrielle (numérique et robotique) pour renouer avec la croissance et l’emploi, au moyen de quelques réformes favorisant l’entreprenariat, l’innovation et la compétitivité des entreprises (par des allègements de charges notamment). Un tel modèle économique peut-il être fortement créateur d’emploi – et d’emploi peu qualifiés ? Qu’a-t-il à offrir aux territoires éloignés des métropoles qui ne bénéficient pas des retombées concrètes de la globalisation ? Celui qui s’est présenté lors de son dernier meeting comme le candidat du travail a en tout cas une clarification à opérer sur l’ensemble de son programme, et plus particulièrement sur ses réformes économiques, qui constituent aujourd’hui le socle de son programme – au risque de rester cantonné au statut de candidat des élites métropolitaines.

Plus largement, il est essentiel de s’interroger sur la place dévolue au politique par rapport à l’économique dans le projet macronien : la politique vise-t-elle à nous projeter dans un horizon de bien commun à partir de l’analyse de la situation actuelle ou a-t-elle pour ambition d’adapter une société aux évolutions de la sphère économique ? La question est cruciale lorsqu’on la rapporte aux interrogations formulées par le Pape François dans l’encyclique Laudato Si, où il exprime ses inquiétudes concernant la soumission du politique à un « paradigme technico-économique ». Un des maux politiques actuels est, pour le Pape François, la renonciation du politique à dessiner un horizon du bien commun à partir des urgences économiques, sociales et écologiques pour se réfugier dans une fonction de chambre d’enregistrement des évolutions techniques et économiques. Emmanuel Macron semble bel et bien participer de cette défaite assumée du politique. Ses allusions à la transition énergétique ne sont d’ailleurs que l’occasion d’évoquer les opportunités à saisir en matière de green business.

La candidature d’Emmanuel Macron est une forme de réponse à la crise idéologique actuelle. Or, il est possible de dire que cette réponse n’est pas la bonne. Le candidat d’ ”En Marche” pose pourtant un débat clair : abandonner le politique à l’économique et à la technique, ou reconstruire sa légitimité en la projetant dans l’Histoire à l’aune d’un nouveau projet collectif. L’écologie peut-elle être une voie d’édification de ce projet ?


[1] http://www.lexpress.fr/actualite/politique/sondage-hollande-monte-macron-plane-fillon-vacille_1864661.html

[2] https://www.youtube.com/watch?v=ggigQxtN5vU

[3] Voir notamment « Emmanuel Macron, la stratégie du météore » (https://www.youtube.com/watch?v=IdJswgV4uQw) et « Dans la tête d’Emmanuel Macron » (https://www.youtube.com/watch?v=DKimfuAWNvQ)

[4] « Dans la tête d’Emmanuel Macron » – LCP – octobre 2016

[5] Discours de lancement de candidature pour 2017 – 16 novembre 2016. https://en-marche.fr/discours-demmanuel-macron-16-novembre-2016/

[6] Ibid.

[7] Propos de Pierre Gattaz le 7 avril 2016.

[8] voir notamment l’analyse de Gaël Brustier sur le positionnement d’Emmanuel Macron dans la crise idéologique actuelle : http://www.slate.fr/story/118839/macron-revolution-passive

[9] http://www.lepoint.fr/presidentielle/qui-sont-les-marcheurs-d-emmanuel-macron-11-12-2016-2089551_3121.php

Marie-Hélène
Marie-Hélène, membre des Alternatives Catholiques.

7 thoughts on “Macron : peut-on croire à l’Emmanuel ?”

  1. Excellente analyse..
    Les questions finales sont judicieuses. Voulez-vous que je propose des éléments de réponse à la dernière question ?

  2. Je suis en fort désaccord avec votre vision. Tant que la politique prétendra pouvoir faire sans l’économique, on prendra le risque de se retrouver dans des crises type 1930 avec l’arrivée des extrêmes au pouvoir. Les crises sont presque exclusivement corrélées a des taux de chômages explosifs, et un niveau de vie au plus bas. Certes, il ne faut pas abandonner le politique au bon vouloir économique, mais le politique a besoin d’une économie stable et prospère pour organiser la vie dans la cité. Si vous lisez les propositions de Macron de plus près, vous remarquerez qu’elles sont très concrètement orientées sur la redistribution des gains économiques (financiers ou autre) au plus grand nombre pour que tous bénéficient de cette économie dynamique.

    De plus, je pense qu’il serait judicieux d’aller regarder plus en profondeur les propositions plutôt que de s’arrêter longuement sur les techniques de communications qui sont, certe modernes, mais parlent au peuple qui souhaite le changement. Un candidat bon sur la forme n’est pas forcément mauvais sur le fond!

    1. Reinette, je suis très en accord avec vous sur votre réponse à cet article;
      ceci dit il me semble être la meilleure réflexion sur le phénomène Macron, même si je suis sûr que cela dépasse nettement un -pour faire court en évoquant l’une des critiques de l’article – bon produit de marketing politique; car je pense qu’il pourrait être – même si je ne suis pas d’accord avec certaines de ses idées, en particulier celles en matière sociétale qui sont suggérées, car pas encore exprimées, par ses soutiens et également un des membres de son équipe rapprochée – il « pourrait » être disais-je l' »Homme d’Etat » qu’on n’a jamais retrouvé depuis de Gaulle: Nécessaire en situation de crise devenue je crois grave à force de s’amplifier doucement (à la différence de de Gaulle où la crise était brutalement devenue extrême avec la France sous les bottes nazies).
      Reinette donc je crois que vous avez formulé ce qui ne l’est jamais, qui fait de vous une femme d »Etat potentielle selon moi, la primauté du politique sur la durée mais l’urgence de l’économique au quotidien, que l’on ne peut mépriser sous peine d’impuissance politique. Comment donc parler de cela si ce n’est en vous rencontrant, ce qui est je crois impossible par ce blog.

    2. Vous voulez des faits ? Technique des vases communicants : réduire les APL et geler le smic et les aides sociales d’un côté, et supprimer l’ISF de l’autre. Macron est le sous-traitant politique des milliardaires qui l’ont mis en place. Et pendant ce temps, son premier ministre (lui aussi biberonné au think tank des Young Leaders) se commande avec nos impôts un retour en avion privé (350 000 euros le billet) pour gagner 2h sur le vol initialement prévu à bord de l’avion réglementaire. Écolo de façade. En voilà des faits. Ah et ils ont aussi bien allégé le cadre juridique sur les industries polluantes et dangereuses.

  3. Emmanuel Macron, bulle médiatique et fantasme d’une gauche en recomposition comment peut il être un futur président

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