Aux Assises chrétiennes de l’écologie, organisées à Saint-Étienne du 28 au 30 août, les injonctions à l’action n’auront pas manqué. Quoi de plus logique pour ces Assises organisées dans un contexte de prise de conscience généralisée de la crise écologique, sur fond de COP21, par une Église galvanisée par l’encyclique du Pape François ? « Le défi urgent de sauvegarder notre maison commune inclut la préoccupation d’unir toute la famille humaine dans la recherche d’un développement durable et intégral, car nous savons que les choses peuvent changer », écrivait le Pape en ouverture de Laudato Si.
Aux Assises de Saint-François, trois grandes voies de l’engagement chrétien en écologie se sont exprimées : celle de la conversion personnelle, celle de l’engagement en communauté et celle de l’engagement plus proprement politique. Que peuvent apporter les chrétiens sur ces différents chantiers ? Peut-être d’abord la conscience d’une nécessaire cohérence entre ces différentes formes d’engagement.
En matière d’engagement aussi, « tout est lié »
Le Pape François l’a affirmé à maintes reprises : il n’y aura pas d’engagement écologique authentique sans « conversion écologique », d’abord personnelle. Le cardinal Barbarin a rappelé, lors de la table ronde organisée le 28 au soir, la définition que donne le pape de cette conversion écologique : « la conscience amoureuse de ne pas être déconnecté des autres créatures, de former avec les autres êtres de l’univers une belle communion universelle ». Il a insisté sur la nécessité de développer la « théologie de la création », représentée l’après-midi même par le théologien Fabien Revol, titulaire de la chaire Jean Bastaire pour une vision chrétienne de l’écologie intégrale, créée cette année à l’Université catholique de Lyon. On voit bien en quoi la tradition chrétienne peut ici nourrir un changement de regard et de mode de vie, en développant une cohérence entre foi personnelle, prière, discours et actes.
Les Assises ont aussi été l’occasion de mettre en avant la mobilisation de collectifs sur les questions d’écologie : opposition au traité transatlantique (TAFTA), engagement du mouvement scout dans la COP21, association « Oeko-logia » – étroitement liée aux dominicaines de Taulignan -, … C’est dans la constitution de communautés d’engagement que peuvent être expérimentées des alternatives sociales et économiques susceptibles de répondre aux défis actuels. C’est ce que montre par exemple la création de la toute nouvelle revue « LIMITE », espérant fédérer autour d’elle des acteurs et penseurs d’une écologie intégrale assumant pleinement la notion de décroissance. C’est ce que montre encore l’éco-hameau chrétien fondé par Alexandre et Marie Sokolovitch près de Dijon, « Goshen », regroupant plusieurs familles autour d’une exploitation en agriculture biologique, d’un engagement dans les associations locales et d’une vie de prière commune. Ici encore, on voit bien comment la tradition chrétienne peut favoriser la constitution de communautés d’engagement capables d’enraciner l’action dans une foi commune.
L’expérience des Sokolovitch, qui mêle conversion spirituelle, personnelle et engagement collectif est sans doute le meilleur exemple d’engagement chrétien dans l’esprit de l’encyclique. Car en matière d’engagement aussi, « tout est liée », pour reprendre le leitmotiv du pape dans Laudato Si. Depuis la prière jusqu’à la participation à la vie associative et politique locale, la vie de chrétien engage la personne humaine dans toutes ses dimensions.
Si le christianisme a beaucoup à apporter à l’écologie, il semble indéniable que l’écologie ait aussi beaucoup à apporter à notre christianisme, nous rappelant à la dimension profondément révolutionnaire de notre foi, qui n’est ni un acte proprement individuel, ni un acte proprement communautaire, ni une dynamique à mettre au service d’un ordre socio-politique immuable, mais bien un moteur pour affronter les défis qui s’offrent à notre condition humaine. La force de l’engagement chrétien en écologie tiendra sans doute en deux aspects : sa capacité à prendre en compte les différentes dimensions de la personne humaine pour construire des communautés d’engagement solides et sa capacité à aller à la rencontre des non-chrétiens sur des terrains de lutte communs.