Les Alternatives Catholiques

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Atelier de formation | Laboratoire d'action – Cafรฉ & Coworking "Le Simone" ร  Lyon

Le mariage : contrat ou institution ?

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Publiรฉ le 4 octobre 2013 1 commentaire

Notre ami Jean-Baptiste, participant actif et fidรจle des Alternatives Catholiques, nous transmet cette trรจs รฉclairante synthรจse juridiqueย :


Le 26 juin 2011, le ministre des affaires รฉtrangรจres, Monsieur Juppรฉ, aprรจs sโ€™รชtre dรฉclarรฉ favorable ยซ ร  quelque chose comme un mariage [homosexuel] ยป avec peut-รชtre ยซ un nom diffรฉrent ยป concluait que lโ€™on nโ€™avait pas sur le mariage homosexuel le mรชme regard que celui que lโ€™on pouvait avoir vingt ou trente ans auparavant. Si, en politique, une dรฉfinition peut รฉvoluer rapidement, il nโ€™en va pas de mรชme pour le droit, le temps de la politique nโ€™รฉtant pas le temps du droit. Ainsi Portalis, lโ€™un des rรฉdacteurs du Code Civil, dรฉfinissait le mariage dans son Discours prรฉliminaire au projet de Code Civil comme ยซ lโ€™union de lโ€™homme et de la femme qui sโ€™unissent pour perpรฉtuer leur espรจce et sโ€™aider, par des secours mutuels, ร  porter le poids de la vie ยป. Les auteurs du Lexique des termes juridiques Dalloz 2007 en retiennent, plus de deux cent ans aprรจs Portalis, la dรฉfinition suivante : ยซ leย  mariage est lโ€™union lรฉgitime de lโ€™homme et de la femme rรฉsultant dโ€™une dรฉclaration reรงue en forme solennelle par lโ€™officier dโ€™รฉtat civil qui a reรงu auparavant les consentements des futurs รฉpoux, en vue de la crรฉation dโ€™une famille et dโ€™une aide mutuelle dans la traversรฉe de lโ€™existence ยป. La question du ยซย mariageย ยป homosexuel en droit se greffe sur un autre dรฉbat beaucoup plus ancien et au fond peut-รชtre beaucoup plus fondamental, en un mot plus juridique mais moins mรฉdiatique, le mariage est-il un contrat, rencontre de volontรฉs faisant naรฎtre des obligations, ou une institution, corps de rรจgles qui sโ€™impose ร  tous dans lโ€™intรฉrรชt de la sociรฉtรฉ ? Le mariage prรฉsente des caractรจres qui lโ€™apparente au contrat, mais au-delร  du contrat, il reste une institution. Le mariage, comme tous les contrats, doit respecter les conditions de validitรฉ mentionnรฉes ร  lโ€™article 1108 du Code Civil, ร  savoir le consentement, la capacitรฉ, lโ€™objet (certain) et la cause (licite). La condition de capacitรฉ exclut les incapables, les mineurs bien sรปr mais aussi certains majeurs protรฉgรฉs. […] Lโ€™article 146 du Code Civil, dans la partie du Code Civil spรฉcifiquement consacrรฉe au mariage, souligne quโ€™ยซ il nโ€™y a pas de mariage lorsquโ€™il nโ€™y a point de consentement ยป. Le Code Civil reprend ainsi cette condition considรฉrรฉe comme essentielle par le droit canon. Le Catรฉchisme de lโ€™Eglise catholique prรฉcise en effet que ยซ lโ€™Eglise considรจre lโ€™รฉchange des consentements entre les รฉpoux comme lโ€™รฉlรฉment indispensable qui fait le mariage. Si le consentement manque il nโ€™y a pas mariage ยป. Proclamer lโ€™importance du seul consentement ne suffit pas, il doit รชtre libre et รฉclairรฉ. […] La singularitรฉ du mariage est bien perceptible tant au stade de ses conditions de formation quโ€™ร  celui de ses effets. […] Les parties ne peuvent par exemple, contrairement au droit commun, amรฉnager leurs obligations, ร  lโ€™exception du domaine patrimonial dans certains cas. Ainsi les parties ne peuvent fixer de termes ร  leur engagement. Le mariage รฉchappe aussi ร  la prohibition des engagements perpรฉtuels prรฉvue par le Code Civil en son article 1780 ยซ on ne peut engager ses services quโ€™ร  temps, ou pour une entreprise dรฉterminรฉe ยป. Par consรฉquent, les รฉpoux ne peuvent pas, en invoquant cette prohibition, faire requalifier leur mariage en contrat ร  durรฉe indรฉterminรฉe auquel il pourrait รชtre mis fin ร  tout moment par lโ€™une ou lโ€™autre des parties sous rรฉserve du respect dโ€™un dรฉlai de prรฉvenance raisonnable. Le mariage nโ€™est donc pas encore un contrat dans lequel lโ€™autonomie de la volontรฉ ne connaรฎtrait plus dโ€™autre limite que la volontรฉ des co-contractants. […]

Si le mariage est plus quโ€™un contrat ยซ pas comme les autres ยป cโ€™est parce quโ€™il est dโ€™abord une institution. Lโ€™institution, rรฉalitรฉ extรฉrieure et supรฉrieure aux individus qui la composent ou quโ€™elle rรฉgit, est au droit ce que la transcendance est ร  la philosophie.ย  Il convient de distinguer les institutions ยซ personnes ยป, telles que lโ€™Etat, des institutions ยซ mรฉcanismes ยป corps de rรจgles rรฉgissant une situation juridique comme le mariage. Lโ€™application de ce corps de rรจgles est dโ€™ordre public, cโ€™est-ร -dire que nul ne peut y dรฉroger, mรชme par contrat. Lโ€™institution matrimoniale rรฉgit ainsi tant les conditions de formation du mariage que ses effets. Les rรจgles impรฉratives rรฉgissant les conditions de forme du mariage concernent ร  la fois les conditions de fond et les conditions de formes. Dans les conditions de fond, lโ€™on peut citer les empรชchements ร  mariage entre certaines personnes, qui tรฉmoignent de lโ€™opposition du droit franรงais ร  lโ€™endogamie (articles 161 ร  164 du Code Civil), lโ€™interdiction de la polygamie et/ou de la polyandrie (article 147 du Code Civil). La diffรฉrence des sexes est une condition de fond du mariage en droit franรงais. Cette derniรจre condition bien que contestรฉe, a plusieurs fondements juridiques. Le premier est la coutume, qui est une source du droit mรชme si le lรฉgislateur ne lโ€™aime guรจre, la soupรงonnant au mieux de conservatrice et au pire dโ€™arbitraire. Le deuxiรจme fondement est lโ€™article 144 qui ouvre le titre du Code consacrรฉ au mariage, il dispose que ยซ lโ€™homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans rรฉvolus ยป.ย  Cet article 144 a survรฉcu aux retouches plus ou moins innocentes opรฉrรฉes par le lรฉgislateur depuis les annรฉes 1970 pour rendre les articles du Code asexuรฉs. A lโ€™รฉpoque la justification รฉtait lโ€™รฉgalitรฉ de lโ€™homme et de la femme, mais il semble comme bien souvent que le lรฉgislateur ait confondu รฉgalitรฉ et identitรฉ. Lโ€™opinionย  nโ€™รฉtant pas ยซ mรปre ยป pour le ยซย mariageย ยป entre personnes de mรชme sexe, le lรฉgislateur, conscient du ยซ sens de lโ€™Histoire ยป laissait des ยซ pierres dโ€™attente ยป. A ce sujet la premiรจre chambre civile de la Cour de Cassation a prรฉcisรฉ dans un arrรชt du 13 mars 2007 que selon la loi franรงaise le mariage est lโ€™union dโ€™un homme et dโ€™une femme. Des groupes de pression LGBT ont essayรฉย  de contester la constitutionalitรฉ des dispositions du Code Civil ร  ce sujet, ils ont รฉtรฉ dรฉboutรฉs de leurs demandes par le Conseil constitutionnel. La diffรฉrence des sexes se justifie par lโ€™une des finalitรฉs du mariage quโ€™est la procrรฉation, finalitรฉ essentielle ร  la sociรฉtรฉ et que lโ€™institution matrimoniale vise ร  protรฉger. Les conditions de forme visent ร  protรฉger et la sociรฉtรฉ et les futurs รฉpoux. Ainsi le mariage est’il cรฉlรฉbrรฉ publiquement, dans la maison commune, toutes portes ouvertes, par lโ€™officier de lโ€™รฉtat civil, reprรฉsentant de lโ€™Etat, devant des tรฉmoins, reprรฉsentants de la sociรฉtรฉ. Le formalisme, souvent perรงu comme une contrainte par nos contemporains, vise dโ€™abord ร  les protรฉger et ร  mettre en รฉvidence le caractรจre public du mariage qui nโ€™est pas une simple affaire privรฉe. Seuls certains effets personnels du mariage seront ici envisagรฉs. Il y a des effets directs et des effets indirects. Les effets directs sont mentionnรฉs ร  lโ€™article 212 du Code Civil ยซ les รฉpoux se doivent mutuellement respect, fidรฉlitรฉ et assistance ยป. Ces effets sโ€™imposent aux รฉpoux, sans รฉgard ร  une รฉventuelle convention contraire. Ainsi les รฉpoux ne peuvent, par contrat, se dispenser mutuellement de leur obligation de fidรฉlitรฉ. Lโ€™effet indirect le plus important du mariage est ร  mon sens la prรฉsomption de paternitรฉ : ยซ pater is est quem nuptiae demonstrant ยป (littรฉralement ยซ le pรจre est celui que les noces dรฉmontrent ยป). En application de cette prรฉsomption qui repose sur lโ€™obligation de fidรฉlitรฉ des รฉpoux, le mari de la mรจre est prรฉsumรฉ รชtre le pรจre de lโ€™enfant (article 312 du Code Civil) permettant lโ€™รฉtablissement de la filiation. Ainsi lโ€™institution matrimoniale vise ร  protรฉger les buts du mariage que sont la procrรฉation et lโ€™aide mutuelle dans la traversรฉe de lโ€™existence. Mais dans la conception contemporaine du droit la volontรฉ individuelle doit รชtre le seul รฉtalon. Le changement des mentalitรฉs passe par une ยซ dรฉsacralisation ยป des institutions, sommรฉes de rendre compte dโ€™elles-mรชmes ร  des volontรฉs individuelles inconstantes. La prรฉservation de lโ€™institution matrimoniale supposerait que le Parlement ne soit pas une simple chambre dโ€™enregistrement de lโ€™รฉvolution des mล“urs, mais en est-il encore capable ?

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